Maurice Burrus naquit le 8 mars 1882 à Sainte-Croix-aux-Mines, dans le Haut-Rhin.

Maurice Burrus

Il appartenait à une famille d'industriels de tabacs et cigarettes de Sainte-Croix-aux-Mines, installée en Alsace sous domination allemande, depuis 1870. Cette famille s'expatria en Suisse au début du 19 siècle, en raison des décrets napoléoniens étendant le monopole de l'Etat français sur la fabrication des tabacs.

Maurice Burrus fit ses études à Dôle, puis au collège Stanislas à Paris. Bachelier, il partit pour Hanovre en vue de s'initier à la langue allemande et à la pratique bancaire. Revenu à Sainte-Croix-aux Mines, il prit la direction de la Manufacture des tabacs familiale. Il fit également des voyages en Asie Mineure, au Canada, aux Etats-Unis.

En dehors de la Manufacture, les investissements de Maurice Burrus furent très diversifiés. Investissements financiers et dans l’agriculture, prises de participations dans de nombreuses sociétés, contrôle de la banque du Rhin, rachat de complexes immobiliers..., Maurice Burrus devint un homme riche, immensément riche. Sa fortune, colossale, lui permit de devenir un des plus grands collectionneurs de timbres au monde, avec une collection estimée à trois milliards de Francs.

Profil, Maurice Burrus

Il subventionna de nombreuses associations et clubs en Alsace. Il construisit de grandes résidences en France et à l'étranger. Il acheta même la fameuse forêt de Saoù dans la Drôme. L'industriel alsacien y fit construire une immense demeure ainsi que la réplique du Petit Trianon de Versailles...

Mais Maurice Burrus fut surtout passionné d'archéologie. Il effectua de nombreux voyages en Grèce et en Asie Mineure, sur les traces de l'Ecole Française d'Athènes, et du grand archéologue allemand, Heinrich Schliemann, découvreur de la ville de Troie à la fin du XIXe siècle...

La rencontre avec Jules Formigé

En 1924, Jules Formigé, alors Architecte des Bâtiments de France, à la faveur d'une inspection dans la forêt de Saoû, dans la Drôme, territoire des Voconces du Nord, rencontra Maurice Burrus dans son immense domaine, entre Crest et Die. Au cours d'une partie de chasse, où les deux hommes parlèrent plus d'archéologie que de gibier, Jules Formigé arriva à convaincre Maurice Burrus de découvrir la Provence Antique. Maurice Burrus revient déjà d'un voyage en Grèce, qui l'aurait fortement impressionné. L'alsacien lui exprima l'émerveillement que la Grèce lui avait fait connaître. Jules Formigé, lui parla des merveilles de la Gaule Narbonnaise. Ils conviennent ainsi d'un périple dans la Provence antique.

En 1925, les deux hommes découvrirent Nîmes, Arles, Saint Rémy de Provence, (Glanum), Fréjus, Orange et ... Vaison, où un étrange prêtre archéologue mène de savantes découvertes. Lors de sa venue à Vaison Jules Formigé fit rencontrer l'abbé Sautel à Maurice Burrus ainsi que le Maire de la ville, Ulysse Fabre. L'abbé Sautel, avec sa faconde légendaire, parla avec enthousiasme de ses découvertes et conduisit son prestigieux visiteur sur le site de Puymin, où se concentrèrent les premières découvertes. Ils parlèrent de l'inscription d’Afranius Burrus découverte à Puymin en 1884 et conservée au Musée Calvet d'Avignon.

Le contexte était très favorable à l’intervention de Maurice Burrus, non seulement en raison des récentes découvertes, mais surtout grâce à l’acquisition par la municipalité en 1915 de la colline de Puymin, située au cœur de la ville antique, d’où, depuis longtemps, on exhumait des vestiges antiques. De 1925 à 1945, malgré les tracasseries administratives et le désordre politique, notre mécène archéologue, conducteur des fouilles, talentueux commentateur de ses propres découvertes, s’est consacré avec énergie et passion au dégagement de plusieurs hectares de terrain. C’est une partie importante de la ville antique qui a pu ainsi ressurgir: spacieuses maisons urbaines, thermes publics, portiques…

Grâce à Maurice Burrus, le théâtre antique a été complètement restauré et aménagé, les vestiges dégagés ont été consolidés, restaurés et valorisés: des aménagements de jardins ont embelli les lieux ouverts au public. Le visiteur peut ainsi appréhender aujourd’hui un certain état des ruines antiques qui est le résultat d’une conception de la restauration des monuments propre aux années 1930.

Burrus, 1er rang, centre gauche, cérémonie à l'occasion du dégagement du théatre antique

On se pose la question: que serait maintenant cette ville de Provence sans le mécénat qui se développa même en pleine Seconde Guerre mondiale?

Outre les restaurations, l’apport de Maurice Burrus est immense: donations de terrains et d’une maison à la ville, importantes subventions pour la conduite des fouilles… Il a permis de doter la ville d’un riche patrimoine, déployé sur les 9 hectares de vestiges archéologiques.

Des milliers de visiteurs y sont accueillis chaque année et le théâtre antique affiche une brillante programmation artistique. Vaison prospère entre l’héritage laissé par le mécène alsacien et les aménagements ultérieurs, comprenant notamment la construction du nouveau musée en 1998. Ce patrimoine contribue à la renommée de la ville, et Léonard Gianadda lui-même s’en est inspiré au cours des années 1970 pour créer le parcours archéologique de Martigny.